25 Sep Compte-rendu des concerts de Bouges et de Valençay 15, 16 et 17 septembre 2023
Compte-rendu des concerts de Bouges et de Valençay
15, 16 et 17 septembre 2023
L’art de vivre à la française
La saison 2023 du programme Nohant Festival Chopin hors les murs se concluait aux châteaux de Bouges et Valençay lors des Journées du Patrimoine.
Accueillis chez Talleyrand qui fut propriétaire des deux édifices, quatre jeunes pianistes présélectionnés pour le 2eme Concours international Frederic Chopin de Varsovie sur piano historique d’octobre prochain, présentaient au public des œuvres inscrites à leur programme.
Pour l’heure, elles allaient être jouées sur le superbe piano Pleyel de 1844 dont la restauration, initiée par Yves Henry, le président du Festival, a bénéficié du soutien de la Fondation d’entreprise AG2R La Mondiale pour la vitalité artistique, et du concours de particuliers au travers de la Fondation du Patrimoine.
Pleyel 1844, le piano du cœur
Le vendredi soir, au Château de Bouges (Centre des monuments nationaux), à la croisée des salons richement meublés de cette « folie » du 18e siècle pleine de charme, le piano, éclairé aux chandelles pour l’occasion, était joué par un jeune pianiste américain, Derek Wang. Son programme comportait la Polonaise en si mineur op. posthume 71 n° 2, Trois Mazurkas en fa mineur op. 50, la Ballade n° 4 puis la Valse op. 43 en la bémol majeur de Chopin, ainsi que des œuvres de Bach, de Mozart et de Kurpinski, un contemporain de Chopin.
Conçu pour les salons où étaient donnés les concerts au 19e siècle, le piano Pleyel exige de l’artiste de renoncer à ses habitudes sur piano moderne. Cet instrument historique ne pardonne ni l’approximation dans l’utilisation de la pédale, ni le relâchement « jazzy » dans le jeu. En effet, le susceptible Pleyel est l’instrument du cœur et de ses émotions les plus nuancées, ses joies, ses vicissitudes et ses peines. Gare à l’emballement tant le retour au calme peut engloutir le discours dans un regrettable abîme sonore.
Derek Wang, maître de l’instrument, parvenait brillamment à surmonter ces difficultés et terminait son récital avec une Sérénade de Schubert transcrite par Liszt qui sublimait toute la magie du moment.
Touché par le romantisme de cette douce soirée irisée d’automne, le public après avoir félicité chaleureusement le jeune pianiste, quittait les lieux à regret à travers un parc artistiquement éclairé.
Un larghetto d’anthologie
Samedi et dimanche, le public avait rendez-vous au Théâtre du Château de Valençay récemment restauré, un bijou néoclassique construit pour distraire les rois d’Espagne placés par Napoléon sous la garde d’un geôlier magnificent, Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord en personne. Quatre pianistes allaient y donner quatre récitals : « Une heure avec Chopin ».
La jeune Nao Takahashi ouvrait la série avec deux œuvres du compositeur en la bémol majeur, une Polonaise op. posthume et la Valse op. 42, les Mazurkas op. 59, puis la Sonate n° 2 op. 35 dite « funèbre » et la Barcarolle op. 60. que le public se plait toujours à retrouver. Avec un jeu clair, maîtrisé et gracieux, la pianiste concluait son récital par une intéressante Polonaise en sol mineur de Karol Kurpinski.
En soirée, après la timide Madoka Okada dans les deux premiers mouvements du Concerto n° 2 et la Barcarolle de Chopin, le public retrouvait Derek Wang dans ce même Concerto en fa mineur, cette fois-ci dans son entier avec « accompagnement orchestral » d’Yves Henry sur pianino historique de 1839 (collection Olivier Fadini). Le larghetto de cette œuvre est sublime mais donné sur le Pleyel, il le fut plus encore. Voici le finale du 3e mouvement.
Le dimanche à 11h, le public retrouvait la jeune Madoka Okada en récital, puis le dernier concert à 15h fut consacré cette fois aux deux Concertos de Chopin, le n° 2 interprété par la coréenne Hyunji Kim puis le n° 1 par Nao Takahashi, toutes deux accompagnées par Yves Henry pour la partie « orchestrale ».
Venus du monde entier, ces jeunes artistes ont donné le meilleur d’eux-mêmes. Souhaitons leur pleine réussite en espérant que cette expérience au sein de deux lieux emblématiques de l’art de vivre à la française, leur apporteront un supplément d’inspiration lors du prestigieux concours de Varsovie. Vous pourrez suivre leur parcours dès le 6 octobre sur le site de l’Institut Chopin de Varsovie qui retransmet le concours en direct : https://nifc.pl/en/
L’heure est venue de refermer cette 57e saison festivalière qui fut riche d’émotions et de talents. Place à la 58e édition qui aura lieu du 8 juin au 24 juillet 2024 avec pour thème « Chopin et ses contemporains ». Un programme à l’acmé du romantisme qui sera dévoilé au public le jeudi 7 mars Salle Cortot par Yves Henry, le président du Festival, Sylviane Plantelin, la vice-présidente et Jean-Yves Clément, le conseiller musical et littéraire, en présence de l’équipe du Festival et d’une pléiade d’artistes.